The living were scarce, but the town existed as always: a mass very much like coal, with bumps and passageways, streaming and drifting without a beacon like a wreck in the ashen air. I found it insane that no one had fought against the invasive obscurity, that not one lantern had been lit, that not one pane of glass gave off any light, anywhere. Fortunately, the air was breathable and not cold, even though Autumn was on the way; it even carried the old warmth exhaled by the soil. My body had been set free, and I went without hesitation to find the cause of that oppression in my soul.
Emerging onto the esplanade that encircles the Church of Saint Nicholas, where a hundred lanes and dead-ends hurl themselves as if into a vat, I caught the secret of that prostration, of that deadly torpor into which the town had plunged, and which remained exactly like the one that I had borne: the sky appeared before me, as the sea appears at the top of a slope, unexpectedly; a bizarre sky, hollowed out, a prehistoric fantasy, formed by the accumulation of gaseous caverns. And the light: a cold and dripping light with a knife's edge, foaming from the cloudy sacks, a light with a venomous tint, a slow ejaculation.
It all seemed to me like the invention of some painter mad or possessed. The discovery of that catastrophic sky awoke my mood of oppression and, at the same time, my sense of an imminent threat that menaced the Earth and the species teeming on its crust. I could not resolve myself to see nothing more than a dusk at its critical moment, its orgasm of light. No; my spirit as well as my stare challenged this impossible sky, because it reflected in reverse the bowels, the abominable internal fluctuations, of the globe; and even more, if I dare say it, because this atmospheric phenomenon seemed to me like a monstrous mistake of nature. And I concealed my aching eyes.
The original text:
Les vivants, on n’en voyait guère; la ville, elle existait toujours, masse charbonneuse tout en aspérités et galeries, encore ruisselante et, sans un fanal, dérivant comme une épave dans l’atmosphère cendrée. Je trouvais insensé qu’on ne fît rien pour lutter contre l’obscurité envahissante, que pas une lanterne n’eût été allumée, que pas une vitre ne s’éclairât quelque part… Par bonheur, l’air était respirable et non glacé, bien que l’automne avançât; il charriait même de vieilles chaleurs expulsées du sol. J’étais physiquement délivré et je ne tardai pas à trouver la cause de mon oppression d’âme. Débouchant sur l’esplanade qui encercle l’église Saint-Nicolas, où cent couloirs et impasses viennent se jeter comme dans une cuve, je surpris le secret de cette mortelle torpeur, de cette prostration dans quoi restait plongée la ville, et en tout semblable à celle que j’avais subie: le ciel venait de m’apparaître inopinément, comme au sommet d’une rampe se découvre la mer; un ciel bizarre, en creux, d’une fantaisie préhistorique, et fait d’une accumulation de grottes gazeuses. Et la lumière, une froide et baveuse lumière à couper au couteau, bouillonnait de ces poches nuageuses; une lumière de teinte vénéneuse lentement éjaculée… Cela me parut l’invention d’un peintre fou ou possédé. La découverte de ce ciel catastrophique réveilla mon oppression en même temps que le sentiment de l’imminent malheur qui menaçait la Terre et l’espèce pullulant sur ses croûtes. Je ne pouvais me résoudre à y voir un crépuscule à son instant critique, un orgasme lumineux. Mon esprit autant que mon regard récusait ce ciel impossible, parce qu’il réverbérait par inversion les entrailles du globe et ses abominables flux, et encore, si j’ose écrire, parce que ce phénomène météorique m’apparaissait comme une monstrueuse erreur de la nature… Et je cachai mes yeux irrités.
-- From "Un crépuscule," by Michel de Ghelderode. Sortilèges, 1941.
No comments:
Post a Comment